X

 

Le reste de la journée passa, et la nuit. L’oiseau noir, qui disait s’appeler Gravious, s’était envolé en criant qu’il en avait assez de ses questions.

Le lendemain matin, après avoir vérifié que son terminal ne fonctionnait toujours pas et que la trappe de la cave restait bloquée, Genar-Hofoen alla se promener jusqu’au bout de la plage de galets dans les deux sens, aussi loin qu’il put ; cela ne faisait guère que quelques centaines de pas de chaque côté, avant qu’il se heurte à une sorte de champ élastique et gélatineux. La vue, au-delà, demeurait parfaitement convaincante, mais ce n’était qu’une projection. Il découvrit un passage, à un endroit, à travers le marais salant, mais rencontra le même champ de force au bout d’une centaine de pas. Il retourna vers la tour pour débarrasser ses chaussures de la boue authentique du marécage qui collait à ses semelles. Il n’aperçut aucun signe de l’oiseau noir à qui il avait parlé la veille.

L’avatar Amorphia l’attendait, assis sur les galets de la grève, les mains nouées autour des genoux, contemplant la mer infatigable.

Genar-Hofoen s’arrêta en le voyant puis continua son chemin. Il le dépassa, entra dans la tour, nettoya ses bottes et ressortit. La créature était toujours là.

— Oui ? demanda-t-il en baissant les yeux vers le représentant du vaisseau.

Celui-ci se leva souplement, tout en angles osseux et membres maigres. Vu de près, sous cet éclairage, son visage long et gris avait quelque chose de neutre et d’informe qui lui conférait une sorte d’innocence.

— J’aimerais que vous parliez à Dajeil, lui dit la créature. Acceptez-vous ?

Genar-Hofoen étudia un instant son regard inexpressif avant de demander :

— Pourquoi me garde-t-on ici ?

— On vous garde ici parce que je voudrais que vous parliez à Dajeil. On vous garde ici parce que je pensais que ce… modèle contribuerait à vous inciter à lui parler de ce qui s’est passé entre vous il y a quarante ans.

Genar-Hofoen fronça les sourcils. Amorphia avait l’impression que bien des questions se bousculaient dans sa tête sans qu’il sût laquelle poser d’abord. Finalement, celle qui l’emporta fut :

— Reste-t-il des états mentaux Stockés à bord de Service Couchettes ?

— Non, répondit l’avatar en secouant la tête. Vous faites allusion au subterfuge qui vous a attiré ici ?

Les yeux de l’humain se fermèrent un bref instant pour se rouvrir aussitôt.

— Oui, je suppose, murmura-t-il.

Ses épaules donnaient l’impression de s’être affaissées d’un coup, se dit l’avatar.

— Et alors, demanda Genar-Hofoen, c’est vous qui avez inventé cette histoire sur Zreyn Enhoff Tramow ou c’est eux ?

L’avatar prit un air songeur.

— Gart-Kepilesa Zreyn Enhoff Tramow Afayaf dam Niskat, dit-il. C’était une Stockée à l’état mental. L’histoire qui la concerne est très intéressante, mais je n’ai jamais suggéré qu’on vous la raconte.

— Je vois, fit Genar-Hofoen en hochant la tête. Et alors, pourquoi ?

— Pourquoi quoi ? demanda l’avatar d’un air perplexe.

— Pourquoi ce subterfuge ? Pourquoi avez-vous voulu que je vienne ici ?

La créature le considéra quelques instants sans rien dire. Puis :

— Vous êtes mon prix, Genar-Hofoen.

— Votre prix ?

L’avatar lui sourit soudain en avançant la main pour toucher la sienne. Le contact de ses doigts était froid et ferme.

— Allons lancer quelques pierres, dit la créature.

Sur ces mots, elle s’avança vers la grève en pente où les vagues venaient se briser sur les galets.

Genar-Hofoen secoua la tête, mais la suivit.

Ils se retrouvèrent côte à côte. L’avatar scruta la longue bande de galets mouillés.

— Chacun d’eux est une arme, murmura-t-il en se baissant pour en ramasser un, qui était de bonne taille.

Il le lança avec force, sans préparation, vers les hautes vagues. Genar-Hofoen en choisit un à son tour.

— Il y a quarante ans que je fais semblant d’être un Excentrique, déclara l’avatar sur le ton de la conversation en se baissant de nouveau.

— Semblant ? demanda l’humain en lançant son galet le plus haut possible.

Il se demandait s’il était capable d’atteindre le champ de force. Le galet retomba et s’abîma dans les flots en furie.

— Pendant tout ce temps, j’ai été un composant actif et empressé de la section de Circonstances Spéciales, n’attendant que leur appel, expliqua le vaisseau par la bouche de son avatar. (Il lui jeta un bref coup d’œil, ramassa un galet puis se redressa.) Je suis une arme, Genar-Hofoen. Une arme contestable, certes, mais une arme. Mon Excentricité apparente permet à la Culture proprement dite de rejeter toute responsabilité dans mes agissements. En fait, je n’obéis qu’aux instructions spécifiques d’un comité du CS qui s’est donné le nom de Bande des Temps Intéressants.

La créature s’interrompit pour lancer son galet en direction de l’horizon factice. Le mouvement de son bras fut si rapide que Genar-Hofoen ne vit qu’un grand flou ; l’air vibra d’un bruit feutré, et il en perçut le déplacement sur sa joue. L’avatar, emporté par son élan, fit un tour complet sur lui-même, puis il s’immobilisa avec un bref sourire presque enfantin en suivant du regard le projectile qui disparut au loin alors qu’il était encore dans la partie ascendante de sa courbe. Genar-Hofoen l’observait aussi. Peu de temps après, il vit le galet commencer à retomber, rebondir sur quelque chose d’invisible et se perdre dans les flots. L’avatar laissa entendre un grognement satisfait. Il semblait heureux de sa prouesse.

— Cependant, continua-t-il, lorsqu’ils m’ont présenté leur demande, j’ai refusé à moins qu’ils ne vous livrent à moi. Vous étiez mon prix. (Il sourit.) Comprenez-vous ?

Genar-Hofoen soupesa un nouveau galet dans le creux de sa main.

— Juste à cause de ce qu’il y a eu entre Dajeil et moi ?

L’avatar sourit, puis se baissa pour choisir un galet, un doigt sur sa lèvre, comme un enfant. Il demeura quelque temps silencieux, apparemment concentré sur cette tâche tandis que l’humain continuait de soupeser le galet en observant sa nuque. Puis la créature déclara :

— Pendant trois cents ans, j’ai été un Véhicule Système Général de la Culture en parfait état de fonctionnement, à haut rendement. (L’avatar regarda l’humain.) Avez-vous une idée, Genar-Hofoen, du nombre de vaisseaux, drones et personnes (humaines ou non) qui peuvent passer dans un VSG en trois cents ans ? (Il baissa de nouveau la tête, prit un galet et se redressa une fois de plus.) J’ai servi de domicile principal à plus de deux cents millions de personnes. Je pouvais, en théorie, abriter plus de cent mille vaisseaux. J’ai construit des VSG plus petits, tous capables de fabriquer leurs rejetons à leur tour et d’avoir leurs propres équipages, leurs personnalités et leurs histoires.

« J’étais à moi seul l’équivalent d’un petit monde ou d’une grande nation, poursuivit-il. Ma tâche et mon plaisir consistaient à m’intéresser de très près au bien-être physique et mental de tous les individus qui se trouvaient à mon bord et de leur fournir – sans effort apparent – un environnement qu’ils trouveraient tous confortable, agréable, stimulant et détendu. Mon devoir consistait également à apprendre à connaître tous ces vaisseaux, drones ou gens, à leur parler, à former des liens d’empathie avec eux et à les comprendre, quel que soit le nombre de ceux qui désiraient communiquer avec moi à n’importe quel moment. Dans de telles circonstances, on acquiert rapidement, si on ne l’avait pas à l’origine, un réel intérêt – voire de la fascination – pour les humains. On a ses goûts et ses aversions ; il y a ceux pour lesquels on fait le minimum et qu’on est content de voir s’en aller, ceux qu’on aime bien et qu’on trouve plus intéressants que les autres, ceux que l’on chérit durant des années, des dizaines d’années, s’ils restent, ou que l’on regrette, s’ils partent, et avec qui on continue de correspondre régulièrement. Il y a des histoires que l’on suit passionnément, longtemps après le départ des intéressés ; on les échange avec d’autres VSG, d’autres Mentaux. On potine, si vous voulez. On voit l’évolution des relations, les carrières qui prospèrent, les rêves qui se flétrissent…

Amorphia laissa aller ses épaules en arrière et lança le galet presque verticalement. Le moulinet de son bras, quand il lâcha le projectile, lui fit faire un bond de cinquante centimètres. Le galet grimpa dans les airs jusqu’à ce qu’il rencontre la voûte invisible, sur laquelle il rebondit pour tomber dans la mer à une vingtaine de mètres du rivage. L’avatar applaudit alors comme un enfant ravi.

Il se baissa de nouveau pour scruter les galets en disant :

— On s’efforce de maintenir un équilibre entre l’indifférence et l’indiscrétion, l’insouciance et l’obsession. Mais, dans les deux extrêmes, il faut se préparer à faire face à des accusations d’échec. Déjà, maintenir une bonne harmonie, statistiquement, dans la norme fixée par ses pairs, peut être considéré comme une réussite. La perfection est quelque chose d’impossible. De plus, il faut accepter, avec un si grand nombre de personnalités et de scénarios différents, quelques impasses, quelques histoires qui s’effilochent au lieu d’arriver à une conclusion nette. Cela n’a pas trop d’importance dans la mesure où il y en a un grand nombre qui connaissent une fin satisfaisante et où ce sont celles qui vous ont personnellement passionné le plus qui se dénouent heureusement.

Il haussa les épaules et se perdit de nouveau dans la contemplation des galets.

— Votre histoire, celle de Dajeil et la vôtre, poursuivit-il, appartient un peu à cette dernière catégorie. C’est moi qui ai joué le rôle déterminant dans la décision de vous laisser accompagner Dajeil Gelian à Telaturier. (Il se releva. Il tenait, cette fois-ci, deux galets dans sa main : un gros et un petit.) J’avais vu que la commission chargée d’étudier votre candidature était très partagée. Ma voix était déterminante. J’ai voulu vous connaître mieux afin de décider. (Il haussa les épaules.) J’ai fait le mauvais choix.

Il lança le gros galet selon une trajectoire très haute puis se tourna vers l’humain en s’apprêtant à lancer le petit.

— J’ai passé ces dernières quarante années à me demander comment je pourrais corriger mon erreur.

Il se détourna pour lancer le petit galet avec force au ras des vagues. Le projectile atteignit le gros galet à deux mètres environ au-dessus des flots. Ils éclatèrent en mille morceaux dans un bref nuage de poussière. L’avatar se tourna alors vers l’humain avec un petit sourire satisfait.

— J’ai donc accepté de feindre de devenir un Excentrique, poursuivit-il ; je jouissais ainsi, tout à coup, d’une liberté que connaissent très peu de vaisseaux. Je pouvais satisfaire mes caprices, mes fantaisies, mes rêves les plus secrets. (Il fronça un sourcil.) Je sais, nous pouvons tous le faire, en théorie, mais les Mentaux ont une conscience et un sens du devoir. En feignant d’être un Excentrique, j’ai pu le devenir un peu – tout en sachant qu’en réalité j’avais des responsabilités martiales plus exigeantes que quiconque. Et en donnant l’impression que j’assumais mon Excentricité sans le moindre état d’âme, j’ai renforcé ma réputation d’Excentrique. Les autres vaisseaux regardaient ce que je faisais en se disant qu’ils pourraient le faire aussi, mais pas pendant longtemps, et que, par suite, je devais être vraiment, mais vraiment, bizarre. À ma connaissance, personne n’a jamais deviné que ma conscience était claire parce que j’avais un but assez sérieux pour compenser les attitudes les plus clownesques et les comportements les plus obsessivement régressifs.

Il croisa les bras.

— Naturellement, reprit-il, on ne s’attend jamais à se voir rappeler continuellement sa folie, jour après jour, durant quarante ans, mais c’est bien ainsi que les choses se sont passées. Je ne m’en doutais pas au début, mais c’est devenu une partie utile et logique de mon Excentricité. J’ai recueilli Dajeil alors que mon exil intérieur venait à peine de débuter. Elle était la seule impasse importante de ma précédente existence. Aucune des autres histoires ne me touchait d’aussi près. Aucune n’était chargée du même poids de responsabilité. La plupart étaient en bonne voie d’être résolues de manière à peu près satisfaisante ou décemment oubliées par le seul fait du temps qui passe et des personnalités qui changent. Seul le cas de Dajeil demeurait, et j’en étais responsable. (L’avatar haussa les épaules.) J’avais espéré, un moment, réussir à la convaincre, lui faire accepter ce je-ne-sais-quoi qui s’est passé entre vous et la voir reprendre son existence normale. Mettre l’enfant au monde signifierait qu’elle serait remise. L’accouchement marquerait la fin de ses épreuves, cette naissance serait un point final. (L’avatar contempla un instant la mer, le front plissé.) Je pensais que ce ne serait pas trop difficile, reprit-il en le regardant de nouveau. J’avais tellement l’habitude d’exercer un pouvoir sur tout, d’influencer les gens, les vaisseaux et les événements. J’aurais même pu si facilement manipuler son corps pour qu’elle fasse ce bébé malgré elle – il m’aurait été facile de déclencher l’accouchement par un moyen chimique ou grâce à un effecteur pendant son sommeil, et à son réveil elle n’aurait pu enrayer le processus – que j’étais sûr que mes arguments, mes explications – et aussi mon aptitude à exercer sur les gens un chantage affectif – ne se heurteraient à aucun obstacle psychologique qu’un peu de technologie ne puisse résoudre aisément dans sa physiologie.

Il secoua la tête d’un geste rapide.

— Les choses ne devaient pas se passer ainsi, dit-il. Elle s’est montrée intransigeante. J’avais espéré avoir raison de sa résistance – lui faire honte, en réalité – en lui montrant l’ampleur de ma sollicitude envers elle, en recréant pour elle tout le décor que vous voyez ici. (L’avatar fit un geste englobant les falaises, le marais salant, la tour et l’océan.) Je lui avais consacré toute mon enveloppe extérieure. J’avais peuplé son habitat de toutes les créatures qu’elle aimait. (Amorphia sourit, penchant légèrement la tête de côté.) Je reconnais que j’avais une autre idée en tête, dit-il, et qu’une compassion si poussée servait surtout à la dissimuler, mais le fait est que mon dessein original était de créer un environnement où elle se sentirait parfaitement à l’aise et qui l’inciterait peut-être à avoir son bébé, quand elle aurait la preuve de tous les efforts que j’étais prêt à déployer pour assurer son bien-être. Mais je me trompais, reconnut-il avec un sourire morose. C’était la deuxième fois que je commettais une erreur avec elle, et je la faisais de nouveau souffrir. Vous êtes – et c’est – ma dernière chance de réparer les torts.

— Et je suis censé faire quoi ?

— Lui parler, c’est tout ! s’écria l’avatar en levant les bras au ciel. (Et soudain, Genar-Hofoen se souvint d’Ulver.)

— Et si je refuse de collaborer ? demanda-t-il.

— Vous partagerez probablement mon sort, lui dit nonchalamment le représentant du vaisseau. Quel qu’il puisse être. Disons, en tout cas, que je vous garderai ici jusqu’à ce que vous acceptiez au moins de lui parler, même si – pour que la rencontre ait lieu – je dois lui demander de revenir de l’endroit où je l’aurai mise en sécurité.

— Et quel sera probablement votre sort ?

— Oh ! La mort, selon toute probabilité, répondit l’avatar en haussant les épaules avec une indifférence apparente.

L’humain secoua la tête.

— Vous n’avez pas le droit de me menacer ainsi, dit-il avec une sorte de rire dans la voix dont il espérait qu’il ne sonnait pas aussi nerveusement que ce qu’il ressentait.

— C’est bien ce que je fais, cependant, Genar-Hofoen. Je vous menace ainsi que vous le voyez.

L’avatar se pencha en avant à partir de la taille en le dominant un instant.

— Je ne suis pas un Excentrique, malgré les apparences, dit-il. Mais réfléchissez. Seul un vaisseau prédisposé comme moi à l’excentricité pouvait adopter le style de vie que j’ai choisi il y a quarante ans. (La créature se redressa.) Il y a une Excession sans précédent dans la région d’Esperi. Il est possible qu’elle constitue un accès à une infinité d’univers et à des niveaux de pouvoir de magnitudes très au-delà de ceux que possèdent tous les Impliqués que nous connaissons. Vous avez l’expérience des méthodes des CS, Genar-Hofoen ; ne soyez pas naïf au point d’imaginer que les Mentaux n’utilisent pas des moyens radicaux, eux aussi, de temps à autre, ou que, dans un cas aussi important, un vaisseau y réfléchirait à deux fois avant de sacrifier une conscience de plus pour un tel prix. D’après mes informations, plusieurs Mentaux ont déjà été compromis dans cette affaire ; si, dans les circonstances actuelles, des intellects de cette importance sont considérés comme des proies acceptables, que croyez-vous qu’une seule vie humaine puisse peser ?

L’humain considéra l’avatar, les mâchoires serrées, les poings crispés.

— Et vous, vous ne faites pas tout cela pour une seule vie humaine ? demanda-t-il. Mettons deux, avec le fœtus.

— Vous vous trompez, Genar-Hofoen, lui dit Amorphia en secouant la tête. C’est pour moi que je le fais, parce que c’est devenu une obsession. Parce que ma fierté ne me permet pas de régler autrement cette affaire. Dajeil, en un sens, en dépit de son masochisme autodestructeur, a gagné. Elle vous a imposé sa volonté il y a quarante-cinq ans, et elle influence la mienne depuis quatre décennies. Plus que jamais, elle a gagné. Elle a fichu en l’air quarante ans de son existence sur un coup de tête boudeur, mais elle aura satisfaction selon ses propres critères. Vous avez passé ces quarante dernières années à vous amuser et à vous payer du bon temps, Genar-Hofoen. On pourrait dire, par conséquent, que vous avez gagné aussi, selon vos critères. Sans compter que vous avez eu la fille, à l’époque, et c’était votre seul objectif, vous vous rappelez ? Votre obsession à vous, votre petite folie. Eh bien, nous voilà réunis tous les trois, à présent, et nous allons payer le prix de nos erreurs mutuelles et entrecroisées. Vous avez contribué à créer cette situation ; tout ce que je vous demande, c’est que vous aidiez à l’apaiser.

— Et pour cela, il suffit que je lui parle ? demanda Genar-Hofoen, sceptique.

La créature hocha la tête.

— Que vous lui parliez. Que vous fassiez un effort pour la comprendre, pour vous mettre à sa place, essayer de lui pardonner ou vous laisser pardonner. Soyez simplement honnête avec elle et avec vous-même. Je ne vous demande pas de rester avec elle, ni d’être de nouveau son partenaire, ni de fonder une famille ; je veux seulement que le blocage qui l’a empêchée de mettre cet enfant au monde soit identifié et réduit, supprimé si possible. Je veux qu’elle reprenne le cours de sa vie et que son enfant commence la sienne. Vous serez libre alors de reprendre le cours de la vôtre.

L’humain se tourna vers la mer. Il regarda sa main et fut surpris d’y trouver un galet. Il le jeta aussi loin et aussi fort qu’il put dans les vagues. Il n’arriva pas à la moitié de la distance du mur invisible.

— Qu’êtes-vous censé faire ? demanda-t-il à l’avatar. Quelle est votre mission ?

— Me rendre sur les lieux de l’Excession. La détruire, si la chose est jugée nécessaire et si elle est possible. Peut-être me contenter d’une réaction de sa part.

— Et l’Affront ?

— C’est une complication supplémentaire, reconnut Amorphia.

Il s’accroupit, une fois de plus, pour examiner les galets à ses pieds.

— Il est possible que je sois amené à m’occuper d’eux aussi, reprit-il.

Il haussa les épaules, choisit un galet, le soupesa, le laissa tomber et en prit un autre.

— Vous occuper d’eux ? Comment ça ? demanda l’humain. Je croyais qu’ils avaient toute une flotte en route.

— C’est exact, fit l’avatar, toujours accroupi. Mais on peut toujours essayer, n’est-ce pas ?

Il se releva. Genar-Hofoen le dévisagea pour essayer de déterminer s’il était ironique ou s’il essayait de le tromper. Impossible à dire.

— Quand est-ce qu’on entre dans la danse ? demanda-t-il en essayant de faire des ricochets sur les vagues avec un galet plat, sans succès.

— La danse, je pense, commence actuellement à trente années-lumière de l’Excession, déclara l’avatar en tendant le bras en arrière. Nous devrions arriver sur les lieux dès ce soir.

Il ramena brusquement son bras en avant. Le galet partit en sifflant et exécuta une douzaine d’élégants ricochets sur la crête des vagues avant de disparaître. Genar-Hofoen se tourna vers lui, surpris.

— Ce soir, dites-vous ?

— Le temps presse, répliqua l’avatar en regardant au loin avec une expression douloureuse. Il vaudrait mieux pour tout le monde que vous parliez à Dajeil… le plus tôt possible.

Il dirigea vers l’humain un sourire absent.

— Tout de suite, par exemple ? demanda Genar-Hofoen en écartant les bras.

— Je vais voir, dit l’avatar.

Il tourna abruptement les talons. Soudain, un ovoïde à la surface réfléchissante, une sorte d’œuf en argent, apparut à l’endroit où il s’était trouvé. Le champ de Déplacement disparut avant que l’homme ait pu enregistrer sa présence ou presque. Il sembla se rétracter sur lui-même, en un rien de temps, en un point qui ne fut bientôt plus visible. On entendit juste un léger pop.

Excession
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